C’est le nom que le vieillard Syméon donne à cet enfant de 40 jours en le prenant dans ses bras et en l’élevant, j’imagine, en action de grâces dans le Temple de Jérusalem, comme pour le présenter à son Père et à nous, à l’ensemble de l’humanité.
C’est le nom que le Concile Vatican II a voulu lui redonner, environ 2000 ans plus tard, en intitulé d’un de ses principaux documents (“Lumen Gentium”). Et en l’an 2025, nous fêtons encore cet Enfant qui est venu, qui a prêché l’évangile et qui a réalisé le Salut par sa mort et sa Résurrection, nous “jubilons” même, car cette Bonne Nouvelle du Salut en Jésus-Christ reste “la grande joie pour tous les peuples” (cf Lc 2,10) : Jésus Christ ! Non seulement pour le passé, mais annoncé encore dans notre présent fébrile, et attendu encore dans le futur pour son retour dans la gloire, car passé, présent et futur se rejoignent en la Personne de ce Jésus, proclamé par Syméon, reconnu comme Lumière par les nations, « annoncé chez les païens, et cru dans le monde » (cf 1Tim 3,16), c’est Lui la Bonne Nouvelle indépassable, « Celui qui est, qui était, et qui vient ! » (Ap 1,8).
Moi aussi, Seigneur Jésus, je t’appelle « Lumière des nations » avec jubilation intérieure, avec la joie d’une Bonne Nouvelle indépassable à annoncer encore au monde entier, à toutes les nations, même celles qui aujourd’hui mettent beaucoup d’énergie (malsaine) à ne pas te reconnaître comme leur vraie Lumière.
Oui, le fait que tu ne sois pas reconnu comme l’Enfant-Dieu, Innocent et Sauveur, faible et ressuscité, « crucifié en raison de ta faiblesse, mais vivant par la Puissance de Dieu » (2Co 13,4) m’attriste infiniment, mais “ma tristesse se changera en joie, et personne ne me l’enlèvera !”
(cf Jn 16,22). Oui, que l’évangile soit mis au “banc des nations” alors qu’il est « Lumière des nations » me peine profondément, d’une part parce que « l’Amour n’est pas aimé », d’autre part parce que rejeter la Lumière est la meilleure garantie d’épaissir les ténèbres et de s’y enfoncer.
« Pour peu de temps encore la lumière est parmi vous. Marchez tant que vous avez la lumière, de peur que les ténèbres ne vous saisissent ; celui qui marche dans les ténèbres ne sait pas où il va. Tant que vous avez la lumière, croyez en la lumière, afin de devenir des fils de lumière. »
Jn 12,35-36.
Cet avertissement de Jésus à la veille de sa mort et de sa disparition dans le tombeau, comme Jonas dans le ventre du cachalot, je souhaite le redire à ma génération.
« Il ne sera pas donné de signe à cette génération !… » Elle en a déjà eu trop, et ça n’a servi à rien qu’à endurcir les cœurs dans l’incrédulité et la méchanceté. « …Si ce n’est le signe de Jonas ». (Mt 16,4). Mais comme alors, ça ne servira à rien pour ceux qui ont déjà le cœur dur.
Prends l’Enfant-Jésus de 40 jours dans tes bras, c’est Marie qui te le tend, mon cher contemporain au cœur dur, et que l’Amour inoffensif et vulnérable « en raison de sa faiblesse » brise ton cœur endurci, qu’il te donne de croire que l’Amour indépassable, plus fort que la mort, et plus puissant que toutes les puissances au Ciel, sur terre et aux enfers, s’est déjà manifesté et que tu n’as rien d’autre à faire qu’à te laisser aimer. Ce n’est pas trop beau pour être vrai. C’est la vraie Lumière des nations, comme il était au commencement, ici et maintenant et toujours et pour les siècles des siècles, amen !
Don Laurent LARROQUE
Ce dimanche s’ouvre pour nous l’évangile selon Saint Luc que nous entendrons tous les dimanches de cette année liturgique. En effet, les lectures du dimanche sont divisées sur trois années pour que chaque année nous puissions parcourir presque tout un évangile synoptique (Saint Matthieu, Saint Marc, Saint Luc). Saint Luc ne fait pas partie des apôtres (comme Saint Matthieu et Saint Jean) mais il s’est renseigné « avec exactitude » auprès « des témoins oculaires et des serviteurs de la Parole » des « évènements qui se sont accomplis parmi nous ». Son évangile est riche de détails et de paraboles. Comme Saint Matthieu il nous offre les détails attendrissants de l’enfance de Jésus. Nous appelons quelquefois cet évangile « l’évangile de la Miséricorde » en raison des trois paraboles du chapitre 15.
Au moment où Saint Luc écrit, la rupture avec le judaïsme est consommée. Les disciples de Jésus n’ont plus le droit de prêcher dans les synagogues. C’est ce qui rend Saint Luc particulièrement sensible aux paroles de Jésus liées à « l’universalité du Salut » : il n’est pas venu sauver seulement un peuple privilégié, mais toutes les nations, de tous les temps et en tous lieux. Cet évangile n’est que le premier tome de Saint Luc, il faudra bien sûr lire ensuite les « Actes des Apôtres » qui racontent – toujours avec précision – une succession d’événements de l’Eglise naissante. Enfin, il est adressé à Théophile, c’est-à-dire « celui qui aime Dieu ». À la suite de tant d’autres, nous sommes ces « Théophile » dont l’intelligence a soif de connaitre Dieu et de grandir dans la foi.
Aujourd’hui – comme après son baptême par Jean Baptiste dans le Jourdain pour aller au désert – Jésus est « poussé par l’Esprit ». C’est dorénavant animé de cette Puissance de l’Esprit que Jésus parle et agit dans son ministère public. Contrairement à Saint Jean-Baptiste qui prêche au désert, Jésus va à la synagogue le samedi, dans un lieu d’affluence. Cette page du livre d’Isaïe sur laquelle s’ouvre providentiellement le rouleau est comme un programme : « porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération et aux aveugles qu’ils retrouveront la vue, remettre en liberté les opprimés, annoncer une année favorable accordée par le Seigneur »
Il ne dit pas explicitement qu’il est le messie, il ne force pas les
intelligences, mais à tous ceux qui ont des yeux pour voir et des oreilles pour entendre, il accomplira sous leurs yeux tous ces signes messianiques. Il donne des indices, il montre que l’écriture parle de Lui, il laisse libre les intelligences d’accepter ou non le signe offert.
Aujourd’hui encore tant de personnes attendent de Dieu d’être contraints à croire, que leur intelligence soit vaincue par des manifestations de Dieu si évidentes qu’il leur devient impossible de ne plus croire. Parfois, nous luttons avec ceux-là avec les armes de l’intelligence comme pour les convaincre. Si l’exercice est bon pour nous, pour affermir nos raisons de croire, il est souvent inefficace pour ouvrir à la foi car ce n’est pas la méthode du bon Dieu. Pour croire, il faut vouloir croire. Les signes deviennent signifiants grâce à la foi et la font grandir de plus en plus.
Que l’écoute et la lecture de l’évangile selon Saint Luc, cette année, fassent grandir notre foi, nous rendent toujours plus dignes de confiance pour annoncer les merveilles que le Seigneur fit pour nous.
Don Marc Antoine CROIZE-POURCELET
Samedi prochain notre paroisse accueillera des prêtres et des fidèles de tout le diocèse pour une journée de prière et de formation ayant pour thème : « la seule croissance, c’est la sainteté ». Nous pourrions nous dire, d’un naturel plutôt suspect ou méfiant, encore un projet à la mode ! Et nous nous surprendrions à entendre au creux de l’oreille le mot de Gustave Thibon : « être dans le vent : une ambition de feuille morte ».
Pourtant, ce n’est pas un projet nouveau. Bien au contraire cette journée veut s’inscrire dans la ligne d’un grand héritage spirituel : la mission paroissiale ! Tombée en désuétude dans les années 1960, la mission paroissiale apparaît en France dans le sillon du renouveau spirituel du Concile de Trente au XVIIème siècle. Pleins de créativité, des prêtres diocésains ou membres de communautés religieuses prennent leur bâton de pèlerin et s’arrêtent dans les paroisses pour évangéliser aussi bien les paroissiens que les brebis égarées. La mission pouvait durer quelques jours, ou plusieurs semaines. Les prédicateurs réunissaient le village ou le quartier, prêchaient la conversion pour les pécheurs, préparaient les âmes à une bonne confession et mettaient en place des exercices de dévotions pour permettre aux fidèles de persévérer sur la voie du salut. Tous les paroissiens se faisaient un devoir d’honneur d’y participer.
Pour être compris de tous, les missionnaires s’adaptent avec beaucoup d’imagination à leur public en développant une culture de l’image. Ils affichent sur la place publique des « tableaux de mission » représentant des cartes pour enseigner les vertus et les vices, ou donner des conseils spirituels. Ils élèvent de grands calvaires, ou des croix de mission, que nous pouvons observer aujourd’hui encore dans nombre de nos villages, en souvenir de leur passage. Ils composent de nouveaux cantiques sur des airs populaires avec des paroles édifiantes. La mission se terminait toujours par une grande Messe où la liturgie était déployée avec solennité et beauté. Avec des moyens nouveaux, ils annonçaient une vérité immuable : Dieu vous aime, il a envoyé son Fils Jésus qui est mort et ressuscité pour vous sauver et vous obtenir le pardon de vos péchés : convertissez-vous et faites pénitence.
Le vénérable dom Michel Le Nobletz fut le premier prêtre à lancer cette initiative missionnaire en Bretagne. Il résumait sa doctrine spirituelle en ces mots : « pour aimer Dieu, trois choses sont nécessaires : la première est qu’il faut connaître Dieu, la seconde est qu’il faut se souvenir souvent de Dieu le jour et la troisième est qu’il faut unir notre volonté à la volonté divine ». Il fut rejoint dans son innovation pastorale par de grands saints missionnaires tels que Saint Louis-Marie Grignon de Montfort et Saint Jean Eudes. Combien de conversions, de vocations, de fruits spirituels en abondance nous leur devons !
Et nous ? Venons nombreux à cette journée pour raviver en nos cœurs la flamme missionnaire de « l’Amour qui n’est pas aimé » !
Abbé Thomas DUCHESNE
Dans la foi catholique, les disciples du Christ sont invités à mettre leur vie au service de ce dernier. L’Eglise a discerné sept œuvres de miséricorde spirituelles et sept œuvres de miséricorde corporelles en méditant la vie du Sauveur :
Conseiller ceux qui sont dans le doute ; enseigner les ignorants ; avertir les pécheurs ; consoler les affligés ; pardonner les offenses ; supporter patiemment les personnes ennuyeuses ; prier Dieu pour les vivants et pour les morts, telles sont les œuvres spirituelles.
Donner à manger aux affamés ; donner à boire à ceux qui ont soif ; vêtir ceux qui sont nus ;
Accueillir les pèlerins ; assister les malades ; visiter les prisonniers ; ensevelir les morts ; telles sont les œuvres corporelles.
Le chrétien agira bien s’il accomplit une ou plusieurs de ces
œuvres de miséricorde, car elles correspondent au commandement du Christ : « tu aimeras ton prochain comme toi-même ».
Dans notre paroisse, il existe de nombreuses manières d’œuvrer en ce sens. Il en est une que j’aimerais mettre en lumière car en plus de répondre au message du Christ, elle permet de lutter contre un fléau : la solitude. Sainte Mère Thérèsa disait à ce propos : « la solitude et le sentiment de ne pas être désiré sont les plus grandes pauvretés » . Il y a beaucoup de personnes qui sont seules et qui ne savent pas comment sortir de cette solitude, en particulier dans les EHPAD. La paroisse organise des visites auprès de ces personnes qui vivent dans des « établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes ». Un groupe de paroissiens va toutes les semaines visiter les personnes qui le désirent, pour donner affection, temps, à ceux qui veulent. Ils accomplissent ainsi l’œuvre de miséricorde : assister les malades. Vous pouvez vous aussi participer à cette belle mission en rejoignant le Service Evangélique des Malades (SEM). Pour ce faire, vous pouvez me contacter directement. L’essentiel passe par l’écoute et le dialogue. C’est à la portée de tous. Ce service est discret et donc une voie royale pour aller au ciel.
Lorsque je suis arrivé à saint Raphaël il y a deux ans, j’ai été marqué de voir l’implication de certains d’entre nous dans le service des obsèques. Des paroissiens viennent prier aux obsèques de personnes qu’ils ne connaissent pas, simplement pour accomplir cette œuvre de miséricorde essentiel : ensevelir les morts. Le Seigneur saura les remercier pour leur service.
Soyons des pratiquants de notre religion : œuvrons !
Don Bruno De LISLE
Les roi-mages expriment ainsi le sens de leur long cheminement. Imitons les Mages, nous qui n’avons pas tant de chemin à faire : venons l’adorer dans sa présence cachée et réelle dans l’Eucharistie. Pour certains d’entre nous, c’est déjà la joie et la paix de leur cœur. Pour d’autres, c’est un désir, pour d’autres, hélas, une certaine indifférence, comme ces “grands scientifiques” de la cour d’Hérode qui connaissent les prophéties concernant le Messie mais qui ne bougent pas devant les signes de son Avènement. Ils n’avaient que quelques kilomètres à faire, là où les Mages en avaient eu des milliers.
« Adoration ou désespoir ». C’est le titre d’un livre d’un auteur spirituel, le Père Marie-Dominique Molinié.
Le Pape a voulu que cette année jubilaire (tous les 25 ans) soit sous le thème des « pèlerins d’espérance ». L’espérance ! C’est une vertu (une force) théologale (de Dieu) en nous. Elle vient de la foi et va vers la charité : les 3 vertus de Dieu qui sont infusées en nous “automatiquement” par le baptême. La Vie de Dieu en nous.
Benoît XVI avait marqué le million de jeunes aux JMJ de Cologne, dans son homélie du dimanche 21 août 2005. La veille, à l’adoration, il leur avait parlé du cheminement des Mages.
« Chers jeunes ! Devant la sainte Hostie, dans laquelle Jésus s’est fait pour nous pain qui soutient et nourrit notre vie de l’intérieur (cf Jn 6,35), nous avons commencé hier soir le cheminement intérieur de l’adoration. Dans l’Eucharistie, l’adoration doit devenir union. (…) Faisant du pain son Corps et du vin son Sang, il anticipe sa mort, il l’accepte au plus profond de lui-même et il la transforme en un acte d’amour. Ce qui de l’extérieur est une violence brutale, devient de l’intérieur l’acte d’un amour qui se donne totalement. Telle est la transformation substantielle qui s’est réalisée au Cénacle et qui visait à faire naître un processus de transformations, dont le terme ultime est la transformation du monde jusqu’à ce que Dieu soit tout en tous (cf 1Co 15,28). (…) Depuis toujours, tous les hommes, d’une manière ou d’une autre, attendent dans leur cœur un changement, une transformation du monde. Maintenant se réalise l’acte central de transformation qui est seul en mesure de renouveler vraiment le monde : la violence se transforme en amour et donc la mort en vie. Puisque cet acte change la mort en amour, la mort comme telle est déjà dépassée au plus profond d’elle-même, la résurrection est déjà présente en elle. La mort est, pour ainsi dire, intimement blessée, de telle sorte qu’elle ne peut avoir le dernier mot. »
Voilà le motif de notre espérance : elle n’est pas une auto-persuasion genre « méthode Coué », mais foi en Jésus. Jésus a déjà transformé le mal en amour. Ce qui s’est passé à la Croix, exprimé le soir précédent, se produit à chaque Eucharistie. Oui, nous attendons tous dans notre cœur un changement de ce monde : il ne peut plus durer comme cela ! Peut-être faudra-t-il une violente purification ? Mais avec Jésus Eucharistie, la transformation du monde est déjà là, pacifiquement, sans violence, dans la douceur et la joie de la foi.
« Venez, adorons », venite adoremus Dominum ! Si nous voulons garder espoir pour nous et être des “premiers de cordée” en 2025 dans le pèlerinage périlleux de nos temps, croyons en Jésus-Eucharistie, unissons-nous à Lui par la communion, et prolongeons cette communion en passant du temps avec Lui dans l’adoration.
(Voir à la page 3, le point de la situation de l’adoration perpétuelle à la Basilique et à la chapelle attenante).
Don Laurent LARROQUE
Chers amis, pour mieux entrer dans la joie de Noël, je vous propose une belle histoire de Jérôme et Jean Tharaud qui, mieux qu’un long discours, nous aide à comprendre la grâce que nous avons reçue suite à l’incarnation du Verbe.
L’histoire se passe à Bethléem à la pointe du jour. L’étoile vient de disparaître, le dernier pèlerin a quitté l’étable et Jésus s’est endormi. Doucement la porte s’ouvrit, poussée, eût-on dit, par un souffle plus que par une main et une femme parut sur le seuil, couverte de haillons, si vieille et si ridée que, dans son visage couleur de terre, sa bouche semblait n’être qu’une ride de plus.
En la voyant, Marie prit peur, comme si elle avait été quelque mauvaise fée qui entrait. Heureusement Jésus dormait ! L’âne et le bœuf mâchaient paisiblement leur paille et regardaient s’avancer l’étrangère, sans marquer plus d’étonnement que s’ils la connaissaient depuis toujours. La Vierge, elle, ne la quittait pas des yeux. Chacun des pas qu’elle faisait lui semblait long comme des siècles.
La vieille continuait d’avancer et voici maintenant qu’elle était au bord de la crèche. Grâce à Dieu, Jésus dormait toujours. Mais dort-on la nuit de Noël ?
Soudain, Il ouvrit les paupières et sa mère fut bien étonnée de voir que les yeux de la femme et ceux de son enfant étaient exactement pareils et brillaient de la même espérance.
La dernière visiteuse se pencha alors sur la paille, tandis que sa main allait chercher dans le fouillis de ses haillons quelque chose qu’elle sembla mettre des siècles encore à trouver. Marie la regardait toujours avec la même inquiétude. Les bêtes la regardaient aussi, mais toujours sans surprise, comme si elles savaient par avance ce qui allait arriver.
Enfin, au bout de très longtemps, la vieille finit par tirer de ses hardes un objet caché dans sa main et elle le remit à l’enfant.
Après tous les trésors des Mages et les offrandes des bergers, quel était ce présent ? D’où elle était, Marie ne pouvait pas le voir. Elle voyait seulement le dos courbé par l’âge, et qui se courbait plus encore en se penchant sur le berceau. Mais l’âne et le bœuf, eux, le voyaient et ne s’étonnaient toujours pas.
Cela encore dura bien longtemps. Puis la vieille femme se releva, comme allégée du poids très lourd qui la tirait vers la terre. Ses épaules n’étaient plus voûtées, sa tête touchait presque le chaume, son visage avait retrouvé miraculeusement sa jeunesse. Et quand elle s’écarta du berceau pour regagner la porte et disparaître dans la nuit d’où elle était venue, Marie put enfin voir ce qu’était son mystérieux présent.
Ève (car c’était elle) venait de remettre à l’enfant une petite pomme, la pomme du premier péché (et de tant d’autres qui suivirent !) Et la petite pomme rouge brillait aux mains du nouveau-né comme le globe du monde nouveau qui venait de naître avec lui.
Chers amis, ce monde nouveau s’établit lorsque nous laissons Dieu venir ! Lorsque le ciel fait irruption dans notre âme.
Alors laissons la grâce de Noël porter du fruit en nous !
Joyeux Noël !
Don Louis Marie DUPORT
En ce 4ème Dimanche de l’Avent, nous entendons cette prière pendant la messe (la « préface »), après nous être associés au triple « Sanctus » des Anges au Ciel, et juste avant que le Ciel ne descende sur la terre par le Mystère de l’Eucharistie :
« Vraiment, Père, il est juste et bon,
pour ta gloire et notre salut,
de t’offrir notre action de grâce,
toujours et en tout lieu,
par Jésus, le Christ, notre Seigneur,
car il est celui que tous les prophètes avaient annoncé,
celui que la Vierge Mère attendait dans le secret de son amour,
celui dont Jean Baptiste a proclamé la venue
et manifesté la présence.
C’est lui qui nous donne la joie
d’entrer déjà dans le mystère de Noël,
pour qu’il nous trouve, quand il viendra,
vigilants dans la prière, et remplis d’allégresse.
« Quand il viendra », c’est-à-dire justement maintenant, à la Messe, de façon cachée, sous le voile des aspects eucharistiques du pain et du vin. C’est Lui qui nous donne « d’entrer déjà dans le mystère de Noël » puisque Jésus-Eucharistie, c’est Noël chaque jour, dans la paille de mon cœur, chaque fois que je communie, « vigilant dans la prière, et rempli d’allégresse », dans un état de grâce avec lui… (Si vous avez des doutes sur votre état de grâce, parlez-en à un prêtre, il aime à se rendre disponible, pour un échange rapide à la sortie, ou en prenant rendez-vous avec lui).
« Quand il viendra », c’est-à-dire en ce Noël 2024, pour qu’il me donne, à moi, à toi, à tous les hommes qui accueillent un Dieu qui se fait homme, qui se fait proche, qui se fait mon frère, qui se fait mon ami (en mendiant mon amour), pour qu’il me donne des grâces particulières de consolation, d’encouragement, de confiance en son dessein bienveillant, d’abandon à sa volonté sainte même si les temps sont confus et grisâtres.
« Quand il viendra », c’est-à-dire lors de son retour dans la gloire, pour que passent les tristesses de ce monde et qu’advienne enfin l’allégresse dont nous demandons à être remplis… Oui, « nous attendons des cieux nouveaux et une terre nouvelle où la justice habitera » (2Pi 3,13).
« Il est celui que la Vierge Mère attendait dans le secret de son amour. » Demandons à Marie qu’elle nous fasse la grâce d’entrer un peu dans son secret (alors éteins tes écrans et entre en recueillement !), dans le refuge sûr de son Cœur Immaculé, pour attendre avec elle cette venue de Jésus, à chaque Eucharistie, à ce Noël-ci, et à la fin des temps.
« Il est celui dont Jean Baptiste a manifesté la présence » dès le sein d’Elisabeth, et qu’Elisabeth, remplie de l’Esprit-Saint et d’allégresse, a reconnu sous le voile d’une Vierge enceinte, comme nous le reconnaissons sous le voile des aspects eucharistiques : le même Jésus caché, le même Enfant-Dieu, le même « qui est, qui était et qui revient bientôt », « Celui qui nous donne la joie d’entrer déjà dans le mystère de Noël, pour qu’il nous trouve, quand il viendra, vigilants dans la prière, et remplis d’allégresse. »
Don Laurent LARROQUE
Au milieu d’une actualité toujours frémissante, nous n’avons peut-être pas remarqué que notre Pape François a sorti récemment sa 4ème encyclique intitulée « Dilexit Nos » sur l’amour humain et divin du cœur de Jésus-Christ ? C’est un texte articulé en 5 parties, en voici quelques extraits pour nous mettre l’eau à la bouche.
Don Marc-Antoine CROIZE POURCELET
§9 « Dans ce monde liquide, il est nécessaire de parler à nouveau du cœur, d’indiquer le lieu où toute personne, quelle que soit sa catégorie et sa condition, fait sa synthèse ; là où l’être concret trouve la source et la racine de toutes ses autres forces, convictions, passions et choix. »
§ 28 « Le Cœur du Christ est extase, il est sortie, il est don, il est rencontre. En Lui, nous devenons capables de relations saines et heureuses les uns avec les autres et de construire le Royaume de l’amour et de la justice dans ce monde. Notre cœur uni à celui du Christ est capable de ce miracle social. »
§ 44 Les paroles de Jésus montrent que sa sainteté n’élimine pas les sentiments. Elles révèlent en certaines occasions un amour passionné qui souffre pour nous, s’émeut, s’afflige jusqu’aux larmes. Il est manifeste que les préoccupations et les angoisses courantes des gens, comme la fatigue ou la faim, ne le laissent pas indifférent : « J’ai pitié de la foule, […] ils n’ont pas de quoi manger […] ils vont défaillir en route, et il y en a parmi eux qui sont venus de loin » (Mc 8, 2-3). »
§ 54. « Il est donc compréhensible que l’Église ait choisi l’image du cœur pour représenter l’amour humain et divin de Jésus-Christ et le centre le plus intime de sa personne. Si l’image d’un cœur avec des flammes de feu est un symbole éloquent nous rappelant l’amour de Jésus-Christ, il convient cependant que ce cœur fasse partie d’une représentation de Lui. Son appel à une relation personnelle de rencontre et de dialogue est de cette manière plus significatif. L’image vénérée du Christ, de laquelle se détache son cœur aimant, inclut un regard qui nous appelle à la rencontre, au dialogue et à la confiance ; des mains fortes, capables de nous soutenir ; une bouche qui nous adresse la parole d’une manière unique et très personnelle. »
§ 65 : Dans l’image du Cœur du Seigneur un triple amour est en effet représenté et nous éblouit. Tout d’abord, l’amour divin infini qui se trouve dans le Christ. Mais nous pensons aussi à la dimension spirituelle de l’humanité du Seigneur. De ce point de vue, le cœur est « le symbole de cette ardente charité qui, infuse dans le Christ, anime sa volonté humaine ». Enfin, il est « le symbole de son amour sensible ».
§ 220 : « Je prie le Seigneur Jésus-Christ que jaillissent pour nous tous de son saint Cœur ces fleuves d’eau vive qui guérissent les blessures que nous nous infligeons, qui renforcent notre capacité d’aimer et de servir, qui nous poussent à apprendre à marcher ensemble vers un monde juste, solidaire et fraternel. Et ce, jusqu’à ce que nous célébrions ensemble, dans la joie, le banquet du Royaume céleste. Le Christ ressuscité sera là, harmonisant nos différences par la lumière jaillissant inlassablement de son Cœur ouvert. Qu’il soit béni ! »
Le Pape François
Tu es toute belle, Marie, et la tâche originelle n’est pas en toi. Par ces mots s’ouvrent les vêpres de l’Immaculée Conception pour faire entrer toute l’Église dans la contemplation de ce grand mystère : Dieu a préservé Marie du péché originel en vue des mérites de Jésus-Christ.
Déjà l’Archange Gabriel avait été saisi devant la beauté de Marie en la saluant de ce titre glorieux : « pleine de grâce ». Saint Germain complète cette salutation : « Salut, paradis de Dieu, jardin raisonnable et très agréable, planté aujourd’hui à l’Orient par la main toute bienveillante et toute puissante de Dieu ». L’Immaculée Conception nous renvoie au péché de nos premiers parents dans le jardin d’Éden, à cette bienheureuse faute, felix culpa, qui nous valut un tel Rédempteur. Pourtant ce fruit de la désobéissance qu’est le péché originel, par lequel « je ne fais pas le bien que je veux mais je fais le mal que je ne veux pas » enseigne saint Paul, n’a pas découragé l’Amour qui n’est pas aimé. Dieu répondit au péché par une promesse : la Femme meurtrira la tête du serpent !
Aujourd’hui nous célébrons l’avènement de cette promesse : la racine de Jessé a jailli, une nouvelle Ève est conçue, un nouveau paradis dans lequel l’arbre de vie fleurit pour la connaissance de la vérité, donnant l’immortalité à ceux qui goûtent son fruit. Marie est le vrai paradis terrestre du Nouvel Adam, « elle réalise toute la plénitude de la Rédemption » disait Jean-Paul II.
La différence entre notre condition pécheresse et la pureté de l’Immaculée la sépare-t-elle de nous ? Non, bien au contraire : c’est en raison de sa pureté que Marie peut mieux que personne nous conduire à son Fils. « Un aveugle peut-il guider un autre aveugle ? (Lc 6,39) » : le regard de la Vierge est le miroir sans tache de la Lumière née de la Lumière.
Alors acceptons de nous laisser émerveiller par la beauté de notre Mère du Ciel en ce temps de l’Avent qui nous attire vers la joie de notre salut. Laissons le Seigneur venir en nos cœurs, laissons-Le préparer notre crèche intérieure dans laquelle Il veut demeurer. Il s’est choisi dans le sein virginal de Marie une chair très pure pour tisser sa propre chair : que Marie nous accompagne sur ce chemin de purification vers Noël pour faire de notre être tout entier le temple du Saint-Esprit. Chantons avec la liturgie vespérale : « Entraînez-nous, Vierge Immaculée, nous courrons après vous à l’odeur de vos parfums ».
Abbé Thomas DUCHESNE
A partir de ce dimanche, nous commençons une nouvelle année liturgique, une année qui est prévisible car nous savons que nous allons vivre l’incarnation de Dieu à Noël et sa mort et sa résurrection dans le Triduum Pascal. En ce sens, nous pouvons dire que nous sommes traditionnalistes. Mais cette année sera également imprévisible dans ce que Dieu nous donnera comme grâces ; car il nous donnera ce dont nous avons besoin pour grandir. Cela fait partie de notre foi. Aussi, il me semble bon de sentir que nous avons un nouveau départ pour progresser vers le royaume de Dieu. En ce sens, nous pouvons dire que nous sommes progressistes : nous marchons vers le Ciel, but de toute notre existence. Cette nouvelle année sera prévisible et surprenante à la fois. Quoi qu’il en soit, le Seigneur nous demande de faire de nouveaux progrès : « Pour le reste, frères, vous avez appris de nous comment il faut vous conduire pour plaire à Dieu et c’est ainsi que vous vous conduisez déjà. Faites donc de nouveaux progrès, nous vous le demandons, oui, nous vous en prions dans le Seigneur Jésus. Vous savez bien quelles instructions nous vous avons données de la part du Seigneur Jésus ». C’est en ce sens que nous devons aborder cette nouvelle année. Préparer Noël comme si c’était la première fois, vivre Pâques en s’émerveillant comme un néophyte qui découvre toute la beauté de l’amour de Dieu. Bref, vivre avec un cœur d’enfant : « celui qui se fera petit comme cet enfant, celui-là est le plus grand dans le royaume des Cieux ». C’est ce que prêchait le prédicateur du pape Benoit XVI, Raniero CANTALAMESSA en parlant de la manière de vivre de Don Camillo, figure du prêtre célèbre s’il en est : « L’un des plus beaux aspects de Don Camillo est lorsqu’il parle à voix haute avec le Christ en croix de tout ce qui se passe dans sa paroisse. Combien de choses changeraient dans notre vie de prêtre si nous prenions l’habitude de le faire, aussi spontanément et avec nos mots. Nous nous apercevrions que nous ne parlons jamais dans le vide, mais à quelqu’un qui est présent, qui écoute et répond ».
Repartons donc de l’avant avec un cœur plus jeune que l’année passée, afin de grandir toujours plus en laissant triompher en nous l’amour du Christ-Roi de l’univers.
Don Bruno DE LISLE