L’actualité politique en ce temps de Carême est consternante. Derrière des déclarations grandiloquentes où la démagogie flirte avec le mensonge, se cache, entre autres, un immense aveu de faiblesse. L’orgueil étant l’anti-vertu qui rend bête (et parfois si bête), cet aveu de faiblesse est évidemment présenté comme le summum du progrès, la fine pointe de la modernité, l’avance assumée de la « Frôonce » sur tous les autres pays du monde encore si arriérés…
Il ne s’agit en réalité que d’une pauvreté humaine et d’une misère morale érigées en normes humanistes, suite logique d’un échec de civilisation. Une nation qui se construit sur la liberté d’empêcher ses enfants de naître et qui anticipe l’évacuation de ses anciens est clairement en situation d’échec. Depuis de nombreuses décennies, nos dirigeants de tous bords ont petit à petit évacué les valeurs laïques chrétiennes qui ont constitué notre pays. Depuis, leurs successeurs se montrent toujours aussi zélés et toujours plus incapables de proposer une alternative au rationalisme et à l’hédonisme qui, au ressenti de tous, étouffent pourtant la personne humaine et la rendent toujours plus insatisfaite.
Ainsi gavée d’individualisme et de matérialisme, la France ne sait plus, ne veut plus, s’occuper de ses enfants à l’existence fragile : elle les supprime. Quel terrible aveu de faiblesse…
Rappelons-nous alors que c’est au sein de l’Empire romain qui amorçait sa décadence, que les chrétiens ont commencé à vivre leur foi : « Ils passent leur vie sur la terre, mais ils sont citoyens du ciel. Ils obéissent aux lois établies, mais leur manière de vivre est plus parfaite que les lois. Ils aiment tout le monde, et tout le monde les persécute. (…) On les calomnie, et ils y trouvent leur justification. On les insulte, et ils bénissent. On les outrage, et ils honorent. (…) L’âme habite dans le corps, et pourtant elle n’appartient pas au corps, comme les chrétiens habitent dans le monde mais n’appartiennent pas au monde. » (Lettre à Diognète, entre l’an 120 et l’an 200)
Chers frères et sœurs par le baptême, il nous faut ré-apprendre ce que nos ainés dans la foi ont vécu il y a de nombreux siècles. Apprenons et apprenons à nos enfants à vivre en ce monde comme une âme sait vivre en paix et heureuse dans un corps étriqué et parfois très malade : certains d’entre nous, paroissiens particulièrement affectés dans leur cœur ou dans leur corps, en donnent le merveilleux témoignage.
En l’an 170, un auteur encourageait déjà les chrétiens à vivre dans le monde sans appartenir au monde. à l’autre bout de la frise historique de l’Église, en 1969, un autre auteur, l’abbé Josef Ratzinger, encourageait également ses frères :
« Je pense, non, je suis sûr que le futur de l’Église viendra de personnes profondément ancrées dans la foi, qui en vivent pleinement et purement.(…) Ce sera une Église plus spirituelle qui ne s’arrogera pas un mandat politique en flirtant tantôt avec la gauche, tantôt avec la droite. Elle sera pauvre et deviendra l’Église des pauvres. (…) Le processus sera long et ardu. (…) Mais après l’épreuve de ces divisions, une grande force émergera d’une Église intériorisée et simplifiée. (…) L’Église connaîtra une nouvelle floraison et apparaîtra comme la maison des hommes, où ils trouveront la vie et l’espérance en la vie éternelle ».
Abbé Jean-Baptiste MOUILLARD
Pour aller plus loin, voici deux petits textes pour ce temps du Carême :
- « Epître à Diognète » (en 170).
- « La prophétie de J. Ratzinger » (en 1969).