L’Evangile de ce dimanche est la suite des six « antithèses » proclamées par Jésus : « on vous a dit…, mais moi je vous dis… » Nous avons cette semaine les deux dernières antithèses, qui insistent sur le thème de « l’amour, accomplissement de la loi » (Rm 13,8-10).
Cette fois encore, Jésus est radical et absolu, de sorte que l’on a tendance à dire : “c’est utopique. Il n’y a que dans les films que l’on voit un chrétien tendre une autre joue à celui qui le frappe”. D’ailleurs Jésus lui-même a repris le valet qui le frappa, au début de sa Passion, il ne l’a pas d’emblée laissé le gifler deux fois (Jn 18,22-23). Il a confronté le méchant à sa méchanceté ; sans violence, cependant. La première lecture nous parle aussi de ce vrai amour du prochain qui consiste à savoir le reprendre s’il le faut.
Jésus, en parlant de « tendre l’autre joue » a employé une hyperbole, c’est-à-dire une exagération pour mieux faire comprendre l’idée de ne pas résister au mal par le mal, mais par le bien (cf Rm 12,17-21). C’est possible, ce n’est pas utopique, parce que « Dieu donne ce qu’il ordonne » dit saint Augustin ; « c’est Lui qui opère en vous et le vouloir et l’action même ! » (Phil 2,13 ; cf Eph 2,10).
Rappelons que Jésus avait introduit son discours par cette affirmation : « Je ne suis pas venu abolir, mais accomplir la Loi et les prophètes », et qu’il le conclut, ce dimanche, par cette phrase : « Vous serez donc parfaits comme votre Père du Ciel est parfait. »
Non pas un perfectionnisme, qui nous laisse seul avec nous-mêmes, mais une perfection de cœur à cœur avec Dieu le Père par Jésus ; être fils dans le Fils, par son Esprit de Fils. D’où la prière du “Notre Père”, qui suit de près cet Evangile et qui est le cœur de tout ce grand discours sur la montagne. C’est Lui, par le Christ, qui est la fin (cf Rm 10,4), et la Loi est seulement un moyen.
Si durant le Carême, on essaye de “s’y remettre”, ce n’est pas avec “plus de loi” mais avec “plus d’Esprit”.
« Accomplir la loi et les prophètes » se comprend aussi comme une purification : il fallait ramener la Loi à son véritable noyau, à son centre vital nécessaire et suffisant : l’amour de Dieu et du prochain. Tout est “rattaché” aux deux premiers commandements (Mt 22,34-40). Qu’il y ait l’amour, il y a toute la Loi. Qu’il manque l’amour et tout se disloque et s’entrechoque (cf aussi Mt 23,23).
Enfin, cet “accomplissement” est une absolutisation. Les huit béatitudes ont déjà ce sens, puisqu’on passe de l’interdiction négative à l’observation positive ; non plus : “tu ne feras pas ceci ou cela”, mais : “bienheureux êtes-vous si vous faites ceci ou cela”, à l’infini dans le bien. Il ne s’agit pas de remplacer par autre chose mais d’absolutiser l’observance. C’est aussi l’esprit des six antithèses. En somme : « la mesure de l’amour, c’est d’aimer sans mesure » (St Bernard).
Mais, redisons-le, non pour absolutiser la production d’un résultat, car « nous ne pouvons rien faire » (Jn 15,5) sans la grâce de Dieu, “qui opère lui-même en nous” comme la sève dans le rameau de vigne. Certes il faut la “synergie” de notre pauvre bonne volonté, mais ce qu’il faut absolutiser ce n’est pas le résultat, c’est la relation filiale, le cœur à cœur avec Dieu Père, par le Christ, dans l’Esprit.
« Si tu veux être parfait, selon l’Evangile, …suis-Moi » ! (Mt 19,21) Deviens disciple du Christ. Telle est la Loi en sa plénitude. En ce sens ce n’est pas une “loi” mais “la grâce de l’Esprit-Saint répandue dans nos cœurs par la vie de Foi en Jésus”, « le Fils de Dieu qui m’a aimé et s’est livré pour moi » (Gal 2,20).
C’est le mot “disciple” qui est finalement comme l’équivalent du mot “loi” selon l’Evangile. Non pas une loi mais une relation personnelle à Jésus. De là, « aime et fais ce que tu veux. »
Don Laurent LARROQUE
L’amour est l’accomplissement
de la loi (2)
L’amour est l’accomplissementde la loi (2) https://paroissesaintraphael.fr/wp-content/themes/movedo/images/empty/thumbnail.jpg 150 150 Paroisses de Saint-Raphael //paroissesaintraphael.fr/wp-content/uploads/2019/10/SIGLE_SEUL_OR_RVB.png