Le pharisien rend grâce à Dieu en disant « parce que moi je…, moi je… ». La Vierge Marie rend grâce à Dieu en son Magnificat en disant : « parce que Toi tu… » « Toi, tu as fait en moi – oui, certes, en moi, mais c’est Toi – : Toi, tu as fait en moi de grandes choses. » Ou « moi je… suis au centre », ou « c’est Toi qui es au centre, ô Dieu. » Deux religions, deux grandes cités, deux mondes séparent le pharisien orgueilleux qui s’élève et sera abaissé, du publicain qui s’abaisse, ou reconnaît, comme Marie, que la vraie grandeur, c’est Dieu ; et il sera élevé à la communion avec Dieu, qui n’a pas de fin.
Le pharisien est un homme très religieux, du moins en apparence. Mais Dieu voit son cœur et « ce qui est grand chez les hommes (ou se croit tel) est objet de dégoût pour Dieu ! » Lc 16,15. L’homme s’est mis au centre. A-t-il vraiment besoin de Dieu ? La religion pharisaïque de l’homme au centre, et de Dieu comme un faire-valoir. C’est très actuel dans les différentes religiosités, purement sociologiques, horizontalistes, immanentistes, soi-disant “dans les limites de la raison” et devenues cependant des “éloges de la folie” et même de la sorcellerie : pas de transcendance, pas d’ouverture à l’Autre, au vrai Dieu qui n’est pas l’homme, et encore moins le diable. L’homme n’a pas à se prendre pour dieu : « Moi, Je…, moi, je… moi je suis dieu à la place de Dieu ! » C’est ce qui ce « moi, je… », au fond. L’homme est ainsi dans l’illusion, et c’est un des aspects de l’orgueil, qui est le pire des maux.
Or Dieu s’est fait homme. Il s’est abaissé. Il a montré le chemin. Il est le Chemin. C’est Jésus. « Nul ne va vers le Père sans passer par Moi. » Jn 14,6. Sans passer par ce chemin de “l’anéantissement devant Dieu, de l’humiliation devant Dieu, de l’obéissance devant Dieu, et l’obéissance jusqu’à la mort, et la mort de la Croix”. Phil 2,6-8.
« Voilà tant d’année que je te sers, dit le fils aîné, sans jamais avoir transgressé un seul de tes ordres ! Donc… » Lc 15,29. Donc quoi ?
Mon cher pharisien, toi qui es convaincu d’être un juste pour toutes tes belles œuvres (qui n’ont pu être faites que parce que Dieu les a faites en toi, cependant ! Eph 2,10), tu crois que tu as acquis des droits sur Dieu ? « Sans Moi, dit Jésus, vous ne pouvez rien faire ! » Jn 15,5. « Un Seul est Bon ! » Mc 10,18. Reste plutôt dans l’action de grâce, sinon tu ne vas plus être en grâce devant Dieu, qui résiste aux orgueilleux mais donne sa grâce aux humbles (1Pi 5,5).
« Quand ce dernier redescendit dans sa maison, c’est lui qui était devenu un homme juste, et non plus l’autre. »
La présomption, cela nous rend « objets de dégoût », infects à Dieu.
« La condition de l’orgueilleux est sans remède », on a lu ça récemment (Si 3,28). Vraiment ?
Non : l’action de grâce – le Magnificat – est le seul remède. « Toujours faire remonter le bien à sa Source. » (Jésus lui-même à St Claude la Colombière, transmis par Ste Marguerite-Marie).
« Purifie-moi de ce mal invisible, de ce péché le plus grand, purifie ton serviteur de l’orgueil. » Ps 18/19,13-14. C’est le pire des péchés, c’est le plus invisible, ça nous rend infects, c’est presque irrémédiable ! Il faudrait peut-être y faire un peu plus attention.
Sans se décourager non plus, car se décourager, c’est encore de l’orgueil ! Car c’est dire : Dieu ne peut rien pour moi.
Quand et à quel prix va-t-on arrêter de se croire le centre, de se prendre pour Dieu, de ne pas le laisser intervenir chez nous ? D’ailleurs, il n’y aura pas d’autre intervention que celle qui a déjà eu lieu : Jésus. Au prix de ton retour, Seigneur Jésus ?
Don Laurent LARROQUE