Cette parabole de Jésus peut susciter chez nous un certain étonnement. En effet une lecture un peu rapide peut nous faire croire que Jésus, aujourd’hui, condamne la richesse, ceux qui sur cette terre ont le bonheur. Avec à la clé une « punition » de la part du Seigneur : le riche est puni, parce qu’il est riche, au malheur pour toute l’éternité.
En réalité les propos de Jésus ne vont pas tout à fait dans ce sens là. Pour bien les comprendre, il nous faut reprendre attentivement ce texte et particulièrement les personnages qui l’habitent.
Il y a tout d’abord le riche. Nous ne savons finalement pas grand-chose sur lui, même pas son prénom. Il n’est pas dit qu’il soit particulièrement méchant, au contraire, puisqu’il pensera même plus tard à sauver ses frères de l’enfer.
Simplement cet homme est dans son monde, dans son confort, dans sa « tour d’ivoire ». A tel point qu’il ne voit même pas à travers son portail,
le mendiant qui crève de faim et qui se contenterait bien de ses poubelles.
Il y a ensuite le pauvre, le mendiant, qui, lui, a un nom : « Lazare » qui veut dire « Dieu aide ». Dieu l’aide, non parce qu’il est vertueux
(on n’en sait rien), mais parce qu’il est pauvre, tout simplement. Voilà la surprise que Jésus fait à ses auditeurs. Car, en fait, cette histoire, ils la connaissent déjà ! C’est un conte bien connu qui venait d’Égypte, mais généralement, on insistait sur les péchés du riche et sur les vertus du pauvre : arrivés dans l’au-delà, les deux passaient sur la balance et on pesait leurs bonnes et leurs mauvaises actions. Au fond, la petite histoire ne dérangeait personne : les bons, qu’ils soient riches ou pauvres, étaient récompensés… les méchants, riches ou pauvres, étaient punis. Tout était dans l’ordre.
Jésus bouscule un peu cette logique : il ne calcule pas les mérites et les bonnes actions car, encore une fois, il n’est dit nulle part que Lazare soit vertueux et le riche mauvais. Jésus constate seulement que le riche est resté riche sa vie durant, pendant que le pauvre restait pauvre, à sa porte : c’est dire l’abîme d’indifférence, ou d’aveuglement qui s’est creusé entre le riche et le pauvre, simplement parce que le riche n’a jamais entrouvert son portail.
Voilà le fond de la pensée du Seigneur en ce dimanche. Il ne nous pousse pas à entrer dans une lutte des classes, en condamnant les riches.
Ce qu’il dénonce, c’est l’indifférentisme (qui d’ailleurs n’est pas forcément le propre des gens riches). Le fait que cet homme n’ait pas fait attention qu’il y avait à sa porte une personne qui avait besoin d’aide.
Il en est de même pour chacun d’entre nous que nous soyons riches ou pauvres. Comment est-ce que je fais attention à ceux qui m’entourent ? Est-ce que je vis dans mon monde, dans ma tour d’ivoire, sans me préoccuper des autres ?
Seigneur, aide-nous en ce dimanche à convertir notre regard, pour que nous ne soyons pas centrés sur nos seules personnes, nos seuls intérêts, mais que nous sachions regarder ceux qui nous entourent.